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La Presse
15-07-2025
- Politics
- La Presse
Sainte-Euphémie : une sainte du top 40 !
Le Québec compte plus de 500 municipalités avec des noms de saints ou saintes. Mais qui se souvient des personnages qui ont inspiré ces toponymes ? Dans cette série estivale, La Presse va sur les traces de cet héritage catholique. Malgré les défis causés par la « dévalorisation », Sainte-Euphémie attire de nouveaux résidants en quête de tranquillité. Sainte-Euphémie-sur-Rivière-du-Sud n'est pas le village le plus passant. Située un peu à l'écart, entre les routes 283 et 281, cette petite municipalité de la MRC de Montmagny brille par son calme et sa tranquillité. Le jour de notre visite, on n'a croisé que deux personnes dans la rue, ainsi qu'un type sur un balcon avec son chien. La région immédiate compte peu d'industries et de moins en moins d'agriculture ou de foresterie. Quant au dépanneur local, il a fermé ses portes. Idem pour le poste à essence. « On est dévalorisés », confie l'adjoint au maire, Styves Laprise, un ancien militaire qui est revenu vivre sur les lieux de son enfance. « Quand j'étais jeune, c'était plus dynamique. On avait même trois clubs de hockey. » Signe des temps : l'église a été désacralisée et rebaptisée L'Héritage, un grand pas sur le plan symbolique. « C'est un dossier émotif, complexe et dispendieux », souligne M. Laprise. Il nous explique que les avis sont très « partagés » en ce qui concerne l'avenir du bâtiment. Certains voudraient le mettre à terre, d'autres le conserver. Mais il faut de l'argent pour l'entretien, et sa valeur patrimoniale n'est pas suffisante pour justifier des subventions. PHOTO LILIA MESTRE, COLLABORATION SPÉCIALE L'église de Sainte-Euphémie, qui a été désacralisée et rebaptisée L'Héritage La bonne nouvelle, c'est que l'endroit sert toujours : une fois par mois, la municipalité organise à L'Héritage des 5 à 7 pour réunir le monde et renforcer la vie sociale. À droite de l'entrée, on a d'ailleurs installé un bar pour ces rencontres informelles, ce qui, on en convient, est un peu bizarre au premier coup d'œil. Un peu de vin de messe avec votre bière ? Malgré ces défis, Sainte-Euphémie demeure un endroit charmant et paisible. C'est sans doute pourquoi la municipalité grossit au lieu de rapetisser. En un an, la population serait passée de 307 à 387 personnes. « Pas énorme, mais beaucoup pour nous », lance M. Laprise. PHOTO LILIA MESTRE, COLLABORATION SPÉCIALE Styves Laprise, adjoint au maire de Sainte-Euphémie Selon le maire adjoint, ces nouveaux résidants viennent d'aussi loin que Québec, Montréal et même la France. Certains ont acheté un lopin de terre, beaucoup profitent des avantages du télétravail. La plupart ont une chose en commun : « Ils sont venus pour la tranquillité », note M. Laprise. Tout le défi est de les intégrer au tissu social et à la réalité de la vie en région. D'ailleurs, c'est aussi pour cette raison qu'on a organisé ces 5 à 7 dans l'ancienne église. Exercice louable s'il en est, mais pas 100 % efficace, aux dires de Jean-Claude Giroux, 81 ans, secrétaire-trésorier de la fabrique. « Ça en fait sortir quelques-uns… », lance-t-il, évitant de terminer sa phrase. Qu'importe ces petits bémols, Sainte-Euphémie vit un discret second souffle. À preuve : on a même sondé les citoyens pour savoir s'ils voulaient d'un nouveau dépanneur. Au moment où ces lignes étaient écrites, le résultat n'était pas encore connu. Miracle dans le tombeau La paroisse de Sainte-Euphémie aurait été fondée officiellement en 1907. Son nom viendrait d'une certaine Euphémie Bernier, qui était rien de moins que la maman du premier curé en résidence, Joseph-Westlan Proulx ! Pour ce qui est d'Euphémie, la sainte, il faut qu'on vous raconte. Parce qu'ici, c'est du sérieux. IMAGE TIRÉE DE WIKIPÉDIA Sainte Euphémie de Chalcédoine Selon Wikipédia, sainte Euphémie de Chalcédoine est ce qu'on appelle une « mégalomartyre ». Les experts interrogés par La Presse ont avoué ne pas connaître ce terme, mais conviennent qu'il traduit bien l'importance du personnage. Cela veut dire qu'elle est significative. En gros, elle est dans le top 40 ! Robin Jensen, professeure de théologie à l'Université de Notre Dame Qu'a-t-elle donc fait pour figurer dans ce palmarès ? Eh bien, cela se passe en deux temps. D'abord sa mort vers 305, sous le règne de l'empereur Dioclétien. Ensuite, son miracle, survenu en 451. Condamnée pour ses croyances religieuses, Euphémie est livrée aux bêtes sauvages après avoir été torturée. Mais surprise : celles-ci s'adoucissent et commencent à lécher ses plaies. Par la suite, les versions diffèrent. La pauvre jeune femme sera soit transpercée d'une lance, soit décapitée, soit mordue par un ours, ce qui l'achèvera. Et voilà qu'Euphémie refait parler d'elle 146 ans plus tard, lors du quatrième concile œcuménique qui a lieu dans sa ville natale de Chalcédoine (aujourd'hui un quartier d'Istanbul). Il faut savoir que cette importante assemblée a lieu dans la basilique où se trouve son tombeau. Plusieurs questions théologiques sont à l'ordre du jour, dont celle de la double nature du Christ (100 % Dieu ou Dieu et homme tout à la fois ?). Faute d'un consensus sur ce sujet crucial, on demande à Dieu de trancher. Les deux camps déposent dans le tombeau de sainte Euphémie des rouleaux contenant leur profession de foi. Après huit jours de prière, quand on rouvre le tombeau, la thèse « hérétique » (100 % Dieu) se trouve dans la poussière aux pieds de la sainte, tandis que la thèse « orthodoxe » (à la fois homme et Dieu) repose en brillant sur sa poitrine, prête à entrer dans son cœur. La réponse est assez claire. D'avoir aidé le concile à choisir un dogme qui est fondamental jusqu'à aujourd'hui pour l'Église catholique et pour les Églises chrétiennes, c'est ce qui la rend tout à fait importante. Sébastien Doane, professeur d'études bibliques à l'Université Laval Selon la légende, un séisme de grande magnitude frappa Chalcédoine au moment de la mort d'Euphémie, ce qui en fait aujourd'hui la sainte protectrice des tremblements de terre. Les reliques de celle qui est plus volontiers associée au dogme orthodoxe que catholique se trouveraient aujourd'hui principalement à l'église qui porte son nom à Rovinj, en Croatie. Mais d'autres petits bouts seraient conservés à l'église Saint-Georges du Patriarcat à Constantinople et à Ravenne, en Italie. Contrairement à l'église de Sainte-Euphémie-sur-Rivière-du-Sud, il n'y a pas de bar en entrant à droite.


La Presse
15-07-2025
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Connaissez-vous vos saint(e)s ?
Le Québec compte plus de 500 municipalités avec des noms de saints ou saintes. Mais qui se souvient des personnages qui ont inspiré ces toponymes ? Dans cette série estivale, La Presse va sur les traces de cet héritage catholique. Malgré les défis causés par la « dévalorisation », Sainte-Euphémie attire de nouveaux résidants en quête de tranquillité. Sainte-Euphémie-sur-Rivière-du-Sud n'est pas le village le plus passant. Située un peu à l'écart, entre les routes 283 et 281, cette petite municipalité de la MRC de Montmagny brille par son calme et sa tranquillité. Le jour de notre visite, on n'a croisé que deux personnes dans la rue, ainsi qu'un type sur un balcon avec son chien. La région immédiate compte peu d'industries et de moins en moins d'agriculture ou de foresterie. Quant au dépanneur local, il a fermé ses portes. Idem pour le poste à essence. « On est dévalorisés », confie l'adjoint au maire, Styves Laprise, un ancien militaire qui est revenu vivre sur les lieux de son enfance. « Quand j'étais jeune, c'était plus dynamique. On avait même trois clubs de hockey. » Signe des temps : l'église a été désacralisée et rebaptisée L'Héritage, un grand pas sur le plan symbolique. « C'est un dossier émotif, complexe et dispendieux », souligne M. Laprise. Il nous explique que les avis sont très « partagés » en ce qui concerne l'avenir du bâtiment. Certains voudraient le mettre à terre, d'autres le conserver. Mais il faut de l'argent pour l'entretien, et sa valeur patrimoniale n'est pas suffisante pour justifier des subventions. PHOTO LILIA MESTRE, COLLABORATION SPÉCIALE L'église de Sainte-Euphémie, qui a été désacralisée et rebaptisée L'Héritage La bonne nouvelle, c'est que l'endroit sert toujours : une fois par mois, la municipalité organise à L'Héritage des 5 à 7 pour réunir le monde et renforcer la vie sociale. À droite de l'entrée, on a d'ailleurs installé un bar pour ces rencontres informelles, ce qui, on en convient, est un peu bizarre au premier coup d'œil. Un peu de vin de messe avec votre bière ? Malgré ces défis, Sainte-Euphémie demeure un endroit charmant et paisible. C'est sans doute pourquoi la municipalité grossit au lieu de rapetisser. En un an, la population serait passée de 307 à 387 personnes. « Pas énorme, mais beaucoup pour nous », lance M. Laprise. PHOTO LILIA MESTRE, COLLABORATION SPÉCIALE Styves Laprise, adjoint au maire de Sainte-Euphémie Selon le maire adjoint, ces nouveaux résidants viennent d'aussi loin que Québec, Montréal et même la France. Certains ont acheté un lopin de terre, beaucoup profitent des avantages du télétravail. La plupart ont une chose en commun : « Ils sont venus pour la tranquillité », note M. Laprise. Tout le défi est de les intégrer au tissu social et à la réalité de la vie en région. D'ailleurs, c'est aussi pour cette raison qu'on a organisé ces 5 à 7 dans l'ancienne église. Exercice louable s'il en est, mais pas 100 % efficace, aux dires de Jean-Claude Giroux, 81 ans, secrétaire-trésorier de la fabrique. « Ça en fait sortir quelques-uns… », lance-t-il, évitant de terminer sa phrase. Qu'importe ces petits bémols, Sainte-Euphémie vit un discret second souffle. À preuve : on a même sondé les citoyens pour savoir s'ils voulaient d'un nouveau dépanneur. Au moment où ces lignes étaient écrites, le résultat n'était pas encore connu. Miracle dans le tombeau La paroisse de Sainte-Euphémie aurait été fondée officiellement en 1907. Son nom viendrait d'une certaine Euphémie Bernier, qui était rien de moins que la maman du premier curé en résidence, Joseph-Westlan Proulx ! Pour ce qui est d'Euphémie, la sainte, il faut qu'on vous raconte. Parce qu'ici, c'est du sérieux. IMAGE TIRÉE DE WIKIPÉDIA Sainte Euphémie de Chalcédoine Selon Wikipédia, sainte Euphémie de Chalcédoine est ce qu'on appelle une « mégalomartyre ». Les experts interrogés par La Presse ont avoué ne pas connaître ce terme, mais conviennent qu'il traduit bien l'importance du personnage. Cela veut dire qu'elle est significative. En gros, elle est dans le top 40 ! Robin Jensen, professeure de théologie à l'Université de Notre Dame Qu'a-t-elle donc fait pour figurer dans ce palmarès ? Eh bien, cela se passe en deux temps. D'abord sa mort vers 305, sous le règne de l'empereur Dioclétien. Ensuite, son miracle, survenu en 451. Condamnée pour ses croyances religieuses, Euphémie est livrée aux bêtes sauvages après avoir été torturée. Mais surprise : celles-ci s'adoucissent et commencent à lécher ses plaies. Par la suite, les versions diffèrent. La pauvre jeune femme sera soit transpercée d'une lance, soit décapitée, soit mordue par un ours, ce qui l'achèvera. Et voilà qu'Euphémie refait parler d'elle 146 ans plus tard, lors du quatrième concile œcuménique qui a lieu dans sa ville natale de Chalcédoine (aujourd'hui un quartier d'Istanbul). Il faut savoir que cette importante assemblée a lieu dans la basilique où se trouve son tombeau. Plusieurs questions théologiques sont à l'ordre du jour, dont celle de la double nature du Christ (100 % Dieu ou Dieu et homme tout à la fois ?). Faute d'un consensus sur ce sujet crucial, on demande à Dieu de trancher. Les deux camps déposent dans le tombeau de sainte Euphémie des rouleaux contenant leur profession de foi. Après huit jours de prière, quand on rouvre le tombeau, la thèse « hérétique » (100 % Dieu) se trouve dans la poussière aux pieds de la sainte, tandis que la thèse « orthodoxe » (à la fois homme et Dieu) repose en brillant sur sa poitrine, prête à entrer dans son cœur. La réponse est assez claire. D'avoir aidé le concile à choisir un dogme qui est fondamental jusqu'à aujourd'hui pour l'Église catholique et pour les Églises chrétiennes, c'est ce qui la rend tout à fait importante. Sébastien Doane, professeur d'études bibliques à l'Université Laval Selon la légende, un séisme de grande magnitude frappa Chalcédoine au moment de la mort d'Euphémie, ce qui en fait aujourd'hui la sainte protectrice des tremblements de terre. Les reliques de celle qui est plus volontiers associée au dogme orthodoxe que catholique se trouveraient aujourd'hui principalement à l'église qui porte son nom à Rovinj, en Croatie. Mais d'autres petits bouts seraient conservés à l'église Saint-Georges du Patriarcat à Constantinople et à Ravenne, en Italie. Contrairement à l'église de Sainte-Euphémie-sur-Rivière-du-Sud, il n'y a pas de bar en entrant à droite.